#Edito

Un référentiel d’impact doit être une vision du monde dans laquelle on souhaite vivre.

Quand on parle transition et planification, évidemment, on se focalise sur l’impact. Pourtant, compliqué de s’y retrouver dans ce vaste monde. Magalie Marais, professeure à la Montpellier Business School, Co-fondatrice de la chaire MIND et vice-présidente du Laboratoire de l’Engagement (LABE) - on peut dire qu’elle pèse - éclaircie nos lanternes sur la compréhension et l’implémentation de l’impact.   

 

goodd : L’impact est une notion qui est de plus en plus utilisée par les experts, les entreprises et nos gouvernants. Quels sont les référentiels de cette notion?

 

Magalie Marais : la notion d’impact est principalement issue de deux sources différentes. L’économie sociale et solidaire réfléchit depuis très longtemps sur les manières de mesurer l’impact. Ses premières interrogations remontent à une vingtaine d’années mais le mot « impact » a réellement commencé à être largement utilisé il y a environ dix ans. Cette notion est aussi liée à la RSE et aux manières dont les entreprises ont cherché à mesurer leurs responsabilités sociétales et environnementales. Le problème aujourd’hui est qu’il existe autant de référentiels d’impact que de visions de la RSE. Certaines entreprises prennent en compte près de 700 indicateurs pour mesurer leurs impacts quand d’autres en choisissent une poignée. Les urgences autour des enjeux sociétaux et environnementaux couplées à la volonté de mesurer l’efficacité des actions mises en place par les entreprises ont provoqué l’essor actuel de la notion d’impact.

 

goodd : comment rendre l’impact simple et accessible ? MM : pour moi, l’impact est une notion très simple et sa définition devrait l’être tout autant. L’impact est l’ensemble des effets des mesures prises par les acteurs qui souhaitent contribuer à la société. Les conséquences de leurs actes sont le plus souvent positives. Les escrocs de l’impact sont ceux qui publient des indicateurs fourre-tout. Plus leur liste est longue, plus elle est suspecte.

 

goodd : quelle est la chaîne de valeur de l’impact ? MM : pour savoir si une entreprise a contribué à la société et vérifier si elle a impacté son écosystème, il est nécessaire de disséquer l’ensemble de sa chaîne de valeurs. Cette chaîne doit tout inclure  depuis la naissance de la société jusqu’à la fin de vie de ses produits et services. Quels sont les ambitions et les objectifs qu’elle s’est fixés lors de sa création? Comment sont conçus et fabriqués ses produits et quels sont leurs usages? Quelles sont les particularités de sa logistique… Cette chaîne de valeurs doit être la plus complète possible.  

 

goodd : quel est le projet de société derrière l’impact ? MM : la plupart des personnes qui s’interrogent sur leurs impacts ne porte pas de projet de société. C’est problématique car sans vision plus globale, l’impact risque d’hériter des défauts de la RSE qui est encore trop souvent considérée uniquement comme une charge bureaucratique supplémentaire par les entreprises. Un référentiel d’impact doit être une vision du monde dans laquelle on souhaite vivre. Peu de sociétés font ce travail. L’impact doit être au cœur de la stratégie des entreprises. Il ne doit pas être considéré comme une liste d’obligations à respecter.  

 

goodd : comment peut-on repérer les « escrocs » de l’impact ? MM : les escrocs de l’impact sont ceux qui publient des indicateurs fourre-tout. Plus leur liste est longue, plus elle est suspecte. Si vous vous êtes fixés des objectifs clairs et précis, vous n’avez pas besoin d’analyser des dizaines de référentiels pour savoir si vous allez dans la bonne direction ou non. La complexité n’est souvent pas bon signe.  

 

goodd : peut-on mener une politique de l’impact à l’échelle d’un pays ou d’un territoire ? MM : une nation peut mesurer l’impact de sa politique publique mais il est très compliqué de mesurer l’impact d’un pays dans son ensemble. Il est, par contre, tout à fait possible de le faire à l’échelle d’un territoire ou d’une entreprise. L’impact doit toutefois être à géométrie variable. Une société a deux options : elle peut se fixer des objectifs phare que toutes ces activités devront atteindre ou définir des buts différents pour chacune de ses filiales. L’important est que ces choix soient clairement explicités.  

 

goodd : peut-on avoir une approche 360 de l’impact dans une entreprise ? MM : Sans aucun doute. Une entreprise doit prendre son temps pour construire son approche collectivement. Comme pour la RSE, ses objectifs d’impact doivent être choisis par tous et non pas uniquement par les membres de son comité de direction à Paris.

Magalie Marais, professeure à la Montpellier Business School, Co-fondatrice de la chaire MIND et vice-présidente du Laboratoire de l’Engagement (LABE)

 

Écrit par

Goodd