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Urbanisme et îlots de chaleur : désormais nous connaissons les zones qui surchauffent, reste à sortir les idées fraîches

Urbanisme et îlots de chaleur : désormais nous connaissons les zones qui surchauffent, reste à sortir les idées fraîches

Les collectivités disposent désormais d’un repère clair pour localiser les zones urbaines les plus sensibles aux fortes chaleurs. Un appui précieux pour adapter les politiques d’aménagement, prioriser les actions et mieux préparer les villes face aux effets du changement climatique. Son nom c’est LCZ pour Zones Climatiques Locales. Son créateur, le Cerema* qui est le Centre d’Etudes et d’expertise sur les Risques, l’Environnement, la Mobilité et l’Aménagement. Et son messager c’est goodd !

 

Par Gaël Clouzard

 

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Draveil, ville de l’Essonne ( 91210 ) bordée par la forêt de Sénart, la base des loisirs et la Seine, doit gérer comme dans toutes les villes françaises des îlots de chaleur. Et cela commence à chauffer sévère…  Cette commune résidentielle en apparence préservée, n’échappe pourtant pas aux vagues de chaleur. Ses quartiers denses comme les Bergeries ou Les Mazières ou bien encore son centre-ville  subissent davantage les températures extrêmes que les abords boisés du Port-aux-Cerises ou de la place du Chêne d’Antin. Mais comment localiser avec précision ces anomalies thermiques urbaines permettant d’agir en priorité ?

Et bien cela tombe bien, le Cerema a une solution à proposer ! Ce nouveau service en ligne et gratuit, baptisé “Zones climatiques locales” (LCZ), cartographie et analyse la sensibilité de 12 000 communes françaises au phénomène d’îlot de chaleur urbain, sur la base d’analyses satellitaires de haute précision. Résultat : 88 grandes aires urbaines sont couvertes, soit 44 millions d’habitants concernés.

 

Accélérer les décisions locales, départementales et régionales

Le principe est simple : chaque quartier est classé selon son exposition potentielle à la surchauffe urbaine. Une photo à l’instant T qui permet d’engager des plans d’action efficaces  et ainsi adapter des projets d’aménagement. Certaines collectivités pionnières l’ont déjà utilisé : Rodez, Libourne, Lille, ou encore Grand Reims.

Ce pré-diagnostic rapide permet de gagner du temps (et de l’argent) en ciblant les zones à traiter en priorité. Il peut être enrichi d’autres outils comme Climadiag (Météo-France) ou Plus fraîche ma ville (PNACC3 / Ademe), pour simuler les effets budgétaires ou techniques d’un projet de rafraîchissement et par ricochet de décarbonation.

 

Une photographie de la surchauffe pour mieux cibler les solutions

Chaque zone urbaine est classée selon son niveau d’exposition à la chaleur, en croisant les données sur la densité bâtie, l’usage des sols ou la présence de végétation. À Draveil comme ailleurs, cette carte permet de poser un pré-diagnostic rapide, utile pour :

  • cibler les quartiers à désimperméabiliser ou végétaliser ;
     
  • intégrer la résilience climatique dans les PLUi et les projets d’aménagement ;
     
  • sensibiliser la population à l’effet réel des matériaux, du goudron ou du manque d’arbres.


Visualisation de la ville de Draveil et des différents îlots de chaleur : les zones rouges et oranges foncées sont les endroits qui génèrent le plus de chaleur. Ce sont généralement des quartiers d’habitations denses, des zones commerciales ou bien encore les zones qui concentrent des activités administratives et commerciales comme le centre ville 


 

Un défi d’ampleur : 5 millions de Français concernés

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 5 millions de personnes vivent dans des quartiers à forte ou très forte sensibilité aux îlots de chaleur. À Paris, Marseille ou Lyon, cela représente près d’un habitant sur deux. Et même dans les villes de taille moyenne, le phénomène progresse. Ces zones couvrent l’équivalent de deux fois la surface de Paris !

La LCZ permet aux élus et leurs équipes de disposer d’un outil stratégique, aligné sur la mesure 13 du PNACC3* : “Renaturer les villes pour améliorer leur résilience”. Grâce à une méthodologie reconnue internationalement, le Cerema classe les territoires selon 17 types de zones climatiques locales (bâties ou naturelles), combinant densité urbaine, matériaux, végétation et activités humaines.

 

Elus, institutions et citoyens : c’est l’affaire de tous !

Au-delà des experts, cette cartographie a un fort potentiel pédagogique et basée sur de l’Open Source permet de rendre visible un phénomène encore trop souvent abstrait : la chaleur n’est pas uniforme, elle varie selon les rues, les quartiers, les matériaux. C’est un outil idéal pour embarquer les citoyens dans la transformation de leur cadre de vie, en expliquant les bénéfices très concrets de plus de nature en ville. Et si nous revenons à Draveil, cet outil pourrait permettre de sensibiliser par exemple les élèves des collèges Delacroix, Daudet et Notre Dame de la commune. Ce type de plateforme doit être déployé là où l’action et la sensibilisation sont nécessaires. Le champ des possibles est donc important. 

Connaître son territoire, c’est déjà commencer par le protéger. LCZ permet aux élus mais aussi aux institutions comme l'Éducation Nationale de disposer d’un levier concret pour faire de la transition climatique une réalité locale, visible et partagée. Face à la réalité du réchauffement climatique, les villes doivent s’adapter.