#Sciences Humaines

La technologie permet de visualiser l’urgence climatique pour mieux la combattre

Être Pro-tech ou anti-tech n’a pas de sens. Être capable de prendre le meilleure de la technologie pour protéger l’environnement, le climat et l’humanité est une nécessité. Goodd prend de la hauteur et revient sur l’utilité des satellites et l’accès à la visualisation de leurs données.  Pour comprendre et trouver des solutions. Mais aussi se rendre compte des avancées concrètes et positives pour nous sortir de la mouise…

Portée par l’élan zélé et arrogant d’une certaine idée d’un solutionnisme écologique survendu, les promesses d’une technologie « verte » au service du bien commun ressemblent à celles des hommes politiques cyniquement définies par Jacques Chirac : elles n’engagent bien que ceux qui les croient. Pour ceux qui conçoivent la technologie, autrement qu’un simple outil marketing, elles peuvent aussi parfois être tenues. Vingt et un ans après le discours de Johannesburg de l’ancien président français, notre maison brûle  toujours. Mais grâce aux progrès technologiques et à la démocratisation des observations et données satellitaires, il n’est plus possible de regarder ailleurs. La guerre de l’espace est aussi celle de la visualisation de la data et de l’histoire qu’elle raconte.

Il y a aujourd’hui plus de 8000 satellites en orbite autour de la Terre. Pas besoin d’aller sur keeptrack.space pour vous rendre compte de leur présence massive dans l’espace. Il vous suffit, un soir de ciel étoilé, de lever la tête quelques secondes, ça marche aussi. Quand ils ne sont pas dédiés aux signaux radios pour les télécommunications et au GPS (Global Positioning System ) pour la navigation, les satellites collectent des images de notre chère planète. Et ils le font avec minutie. Leur résolution peut aller jusqu’à 30 cm et couvrir des dizaines de kilomètres de diamètre et leur capacité de géolocalisation extrêmement précise ( jusqu’à 3,5 mètres ) permet de mettre en relation tout ce qui est repéré avec un ensemble de coordonnées correspondantes. 


Visualiser les bienfaits des programmes de reforestation 

 

« À l’heure de l’urgence climatique, en quoi l’imagerie satellitaire est-elle un outil crucial dans l’analyse et la protection de l’environnement ? », interrogeait en février dernier dans une tribune, Wendy Carrara, Senior Manager pour Digital & European Institutions à Airbus Defence and Space. Notre réponse est simple : tout dépend de l’utilisation faite, du récit que nous voulons raconter et des imaginaires que cette imagerie façonne. Oui, la visualisation des données satellitaires doit continuer de démocratiser la pédagogie autour de la fonte des calottes glaciaires, du recul des glaciers, de la croissance urbaine galopante et destructrice pour la biodiversité ; et des conséquences des incendies de forêt sur l'agriculture. Entre autres. Mais elle peut aussi servir à mettre en exergue la reforestation, les progrès de la renaturation des villes, les régénérations de certains écosystèmes protégés. 

 

Depuis 2021, grâce à sa nouvelle fonction Timelapse et la compilation de dizaines de millions d'images satellites, l'application Google Earth dévoile la Terre de 1987 à 2020. Merci la NASA, le programme Landsat de la United States Geological Survey - le programme d'observation de la Terre le plus ancien au monde -, le programme européen Copernicus et le Create Lab de l'Université Carnegie Mellon, avec qui le géant du web a travaillé sur ce projet pharaonique. Amazon Web Services et Microsoft Planetary Computer ne sont pas en reste. Si n’importe qui peut constater les méfaits du réchauffement climatique sur Dame nature sans bouger de son écran, n’importe qui peut donc aussi visualiser les bienfaits des programmes de reforestation, de renaissance des sols, de protection des océans etc… 

 

La capacité des images satellitaires à expliquer simplement à monsieur et madame tout le monde ce qui est fait, comment, pourquoi et avec quel impact, constitue un formidable levier de lobbying positif. 

Et puis, contrairement au greenwashing de la majorité des bienfaits supposés de l’AgTech – qui servent principalement les dessins de l’agriculture industrielle conventionnelle - la SatTech – et ouais chez Goodd on est aussi spécialiste du nouveau récit par le néologisme – peut servir la prévention des dérèglements climatiques et l’opérationnalité des solutions vertueuses. 

 

Où planter 1,5 milliards d’hectares de forêts ? les satellites ont la réponse

« Nous sommes à un tournant majeur dans l’utilisation de l’imagerie satellitaire. Grâce aux récents développements technologiques, la qualité des images est désormais suffisamment élevée pour révéler les détails les plus précis. Dans le même temps, les progrès du big data et de l’IA permettent de traiter et d’analyser d’énormes quantités de données afin de repérer les tendances et les anomalies », estime Wendy Carrara. Exemple d’une utilisation positive d’une donnée satellitaire : les cartes du couvert forestier mondial. 

Quand le GIEC suggère d'ajouter 1 milliard d'hectares de forêts pour contribuer à limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C d'ici à 2050, la question de savoir où planter les arbres se pose. Pour trouver la réponse, Thomas Crowther, chercheur au Département des sciences des systèmes de l'environnement de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, a analysé près de 80 000 photographies satellites pour en déduire en 2021 dans Science que la majeure partie de l’Europe pourrait, et devrait être une énorme forêt. 

«  Sans les humains, il y aurait 5 800 milliards d’arbres sur Terre. Il y en aurait partout. On a réduit ce nombre de moitié, donc il n’y a que 3 000 milliards d’arbres environ aujourd’hui. Si, aujourd’hui, on ne peut pas replanter 2 800 milliards d’arbres, parce qu’il y a des terres occupées par l’agriculture ou par des zones urbaines, il reste assez de place pour ajouter quelques forêts sur Terre », ajoutait-t-il sur France Info. Il y a quatre ans déjà.

 

« Les possibilités d’utilisation des données satellitaires pour la protection et l’analyse de l’environnement sont infinies »

Pour localiser un certain nombre de spots potentiels de reforestation, les outils Reforestation Hub et Global Forest Watch sont ultra efficaces. Le premier est une cartographie des possibilités de reboisement aux USA, conçue par des chercheurs de l’organisation Nature Conservancy. Le second, lancé en 2014 par le World Resources Institute (WRI), permet de visualiser l'état des forêts, ainsi que l'utilisation des terres, l'occupation des sols, le climat et la biodiversité partout dans le monde. Il est utilisé par des entreprises, des ONG et des gouvernements pour lutter contre l'exploitation illégale des forêts, et aussi, donc, dresser des plans de reforestation massive.

Le mot de la fin pour Wendy Carrara, de Airbus Defence and Space : « pour prévenir les catastrophes naturelles, préserver les océans ou encore pour favoriser l’agriculture durable, « les possibilités d’utilisation des données satellitaires pour la protection et l’analyse de l’environnement sont infinies. Il appartient maintenant aux gouvernements, aux représentants de la loi, aux ONG et aux entreprises d’exploiter cette technologie pour créer des cas d’utilisation "conjoints" qui ne soient pas seulement réactifs, mais puissent être utilisés de manière proactive au fil du temps. » 

 

Écrit par

Benjamin Adler

ODD N°13 : Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques

ODD N°15 : Vie Terrestre