Au cœur du festival Lollapalooza Paris, entre les riffs de guitare, les sons électro, l’ambiance hip-hop, les paillettes et les food trucks, un espace attire l’attention par sa singularité : le Lollaplanet, un véritable village associatif niché au centre de l’Hippodrome de Longchamp. Parmi les stands engagés, l’école Lisaa Mode y tient une place de choix. Étudiants et bénévoles y vendent leurs créations de mode upcyclée, dont les bénéfices sont reversés au Secours Populaire. goodd a rencontré ses membres pour mieux comprendre leur mélodie…
Par Dyssia Hayat
ODD N°12 : Consommation et production responsables
Ce projet engagé trouve ses racines en 2021, lorsqu’une rencontre entre Vincent Lyleire, intervenant à l’école dans la section business developper / sales et coordinateur pour le projet, et les responsables de Lisaa Mode, Romain Boyer (directeur artistique) et Karen Mills (directrice pédagogique), donne naissance à une idée audacieuse : "Ils cherchaient un moyen de sensibiliser leurs étudiants à une mode plus éthique car c’est l’un des secteurs les plus polluants au monde. Nous avons eu l’idée d’un hackathon sur l’upcycling", raconte Vincent Lyleire.
Pendant deux jours et une nuits non-stop, les 600 étudiants de l’école, issus des filières Design et Business, se réunissent en groupes pour concevoir des vêtements à partir de matériaux recyclés. L’événement, intensif mais formateur, donne naissance cette année à 450 pièces uniques, ensuite mises en vente sur le festival.
“Quand tu veux transmettre, c’est que tu veux apporter un questionnement. Je me nourris d’eux.”
Pour Chloé, diplômée du Bachelor design de mode, ce projet est rapidement devenu un rendez-vous incontournable : "J’ai découvert le hackathon dès ma première année, et ça m’a tout de suite parlé. Comme j’essaie toujours de défendre des causes dans mes créations, ça faisait complètement sens. Ça fait trois ans que je participe."
Côté Business, le défi est tout aussi stimulant. Théo, étudiant en première année Bachelor fashion business, souligne la contradiction à laquelle il est confronté : "On apprend à vendre dans un système capitaliste qu’on ne considère pas comme éthique. Le vrai challenge, c’est de s’en servir pour le transformer." Pendant le hackathon, il passe son temps à dialoguer avec les designers pour comprendre leur vision et produire un contenu cohérent avec leurs idées. "Même si deux jours ne reflètent pas toute la complexité du terrain, on espère que l’industrie va finir par ouvrir les yeux sur leur empreinte globale", confie-t-il.
Le stand Lisaa mode au Lollaplanet
Ca remet les pieds sur Terre
Au-delà de l’expérience créative, le hackathon devient un instant fort de vie collective. "C’est un moment hors du temps. On oublie nos soucis, on se concentre sur un objectif commun", confie Chloé. "Ça crée de vraies amitiés au sein de l’école et une complicité unique avec les encadrants". Vincent Lyleire, qui accompagne les sessions de nuit, partage ce sentiment : "Quand tu veux transmettre, tu veux provoquer un questionnement. Je me nourris de leur énergie. Et sur place, pendant le festival, on rencontre des publics très différents. La structure du Lollaplanet est idéale : c’est une vraie place de village, avec des bancs, des shows de Drag Queens, des micros ouverts pour les associations… C’est très humain."
Une révélation personnelle.
Théo envisage déjà la suite : "Je recommencerai l’an prochain. On a besoin d’arrêter le greenwashing et de préparer les générations futures. Les gens ne sont pas assez informés." Même motivation pour Chloé, qui souhaite intégrer des partenariats associatifs dans ses projets professionnels : "Je suis fière de porter ces valeurs. On est une génération pivot, on peut vraiment changer les choses. Grâce à cette expérience, j’ai trouvé ma place."
Et si contribuer au monde associatif en direct peut être intimidant, comme le reconnaît Vincent, cette approche créative permet d’agir autrement : "Travailler en tant que bénévole dans une association peut être difficile émotionnellement. Là, on participe à notre manière, en étant solidaire, mais différemment."
Au Lollapalooza, Lisaa Mode démontre que la mode, même éphémère, peut avoir un impact durable et devenir le marqueur d’une nouvelle identité : un défilé de convictions qui esquisse un autre futur pour les générations à venir.