Communication : L’écologie de guerre peut-elle devenir une arme de transition massive ?
Par Gaël Clouzard
Société
Innovation
Créativité

En période de conflit militaire, les sociétés et les peuples changent. Et généralement pour accompagner ce changement, une nouvelle visualisation d’un monde de paix et de prospérité se met en place. C’est en partant de ce postulat qu’un groupe politique du Parlement européen baptisé les Verts / ALE, vient de lancer une campagne engagée et créative pour demander aux Européens de réduire leur consommation d’énergie. Et ainsi mettre la pression sur les acteurs politiques.
Cette campagne invite à signer une pétition dont les finalités géopolitique et écologique sont aussi limpides que synergiques : réduire notre dépendance aux énergies russes tout en économisant et accélérant notre transition vers les énergies renouvelables. Les signataires sont également encouragés à viraliser la campagne, notamment en téléchargeant des posters montrant le combat et le monde de demain en reconstruction. C’est un de ces derniers qui a retenu l’attention de Goood !
Mais avant tout, c’est quoi l’écologie de guerre ?
Cette appellation guerrière consiste, dans un contexte de conflit armé conduit par un État contre la souveraineté d’un autre État, à voir « une arme pacifique de résilience et d’autonomie » dans le tournant vers la sobriété énergétique.
Le constat de départ est simple : la dépendance énergétique de l’Europe à l’égard de la Russie, en particulier en termes d’approvisionnement de pétrole et de gaz, implique un financement indirect de l’entreprise militaire conduite par l’état agresseur. Et donc une complicité involontaire avec la guerre. Ce terme d’écologie guerrière a vu le jour avec le conflit armé en Ukraine.
Comme expliqué dans la revue Le Grand Continent : « Le dispositif de l’écologie de guerre connaît un succès retentissant. En France, il a été promu par le ministre de l’économie et des finances Bruno Le Maire, dans un appel à la modération des ménages, ainsi que dans une tribune publiée par l’ancien président François Hollande. En France encore, le candidat écologiste aux élections présidentielles Yannick Jadot ne cesse de répéter que les circonstances actuelles ne font que confirmer le programme défendu depuis toujours par son parti. Le secrétaire d’État britannique à l’énergie et à la stratégie industrielle Kwasi Kwarteng présente autrement cette écologie de guerre en affirmant que la stratégie « Net Zero » et les politiques climatiques sont désormais intégrées dans le cadre plus large des principes de la sécurité nationale. Le président américain Biden emploie une rhétorique similaire, quand le ministre des finances allemand Christian Lindner définit les énergies renouvelables – qui sont le pendant positif de l’affranchissement à l’égard du gaz russe – comme le socle de la liberté à venir.
A gauche une création qui reprend les codes du réalisme socialiste voulu par le communisme et à droite, un visuel est inspiré de « Rising the flag on Iwo Jima » une scène de la guerre du Pacifique immortalisée par Joe Rosenthal le 23 février 1945
Une rhétorique et une créativité qui doivent servir à tous
La créativité en temps de guerre s’exprime souvent à plein pot. Et les affiches, qui nous interpellent, s’inspirent du réalisme socialiste prôné par le communisme d’après-guerre. Au travers de cette iconographie, les Verts / ALE ont le mérite de représenter la lutte pour une écologie intégrée dans la résistance et la reconstruction d’un pays.
L’image a cette puissance de représenter un combat et de visualiser le monde de demain. La communication peut y trouver un levier d’expression qui permettrait aux entreprises de communiquer avec des prises de positions fortes et illustrées. Les moyens graphiques tendent désormais à en être le mode d’expression privilégié. Visant à l’efficacité, à la lisibilité, les graphistes systématisent le trait simplifié, la représentation stylisée, les couleurs franches et contrastées, la réduction du nombre d’éléments représentés, bannissant généralement la surcharge textuelle et le « crayonnage ».
Le recours à ces procédés permet de concentrer, en un « raccourci » saisissant, le message politique. Un raccourci qui évite toute forme d’argumentation et de raisonnement. La conviction doit être emportée sur un autre terrain. Technique classique de propagande, l’utilisation de l’image, en particulier de celle créée par le graphiste est par excellence un appel aux sens, aux affects du passant ; et in fine à l’émotion. Car clairement pour enrayer le discours du capitalisme empreint de divertissement, de consommation et de réussite il va falloir redoubler d’efforts visuels et conceptuels pour faire comprendre qu’un autre monde tout aussi cool et moins nuisible est possible. Créativité, si tu nous lis…
Gaël Clouzard
Abonnez-vous à la goodd.letter
Un très waste sujet
linkedintwitter Un très waste sujet « On gagne ensemble, on perd ensemble ». En théorie. Dans la pratique, et encore plus dans la transformation sociétale – et donc forcément écologique, l’adage prisé et galvaudé des coachs (et pas que sportifs) en mal...
Usages et comportements : Et si on écoutait ceux et celles qui pratique la sobriété
linkedintwitterUsages et comportements : et si on écoutait ceux et celles qui pratique la sobriétéParGaëtan ManginATER en sociologie, Université d’ArtoisAlex RoyChercheur associé en sociologie urbaine, ENTPEODD N12 : Consommation et production responsables« Je baisse,...
Comment ça marche la renaturation d’une ville ?
linkedintwitterComment ça marche la renaturation d’une ville ?Par Gaël ClouzardODD N°11 : Villes et communautés durables ODD N°13 : Mesures relatives à la lutte contre le réchauffement climatique ODD N°15 : Vie terrestreAlors que l'objectif national de « zéro...
Sator : la plateforme MOOC qui vous prépare, avec discernement, au monde qui vient…
linkedintwitterSator : la plateforme MOOC qui vous prépare, avec discernement, au monde qui vient…Par Benjamin AdlerODD 4 : Éducation et qualité ODD 13 : Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiquesMayday, mayday, alerte cocorico. On répète : alerte...
Vous pourriez aimer
Il n’y a pas que les jeunes qui vont sauver le climat
linkedintwitterIl n’y a pas que les jeunes qui vont sauver le climatUne des plus grandes impostures intellectuelles de ces vingt dernières années est de faire croire que les jeunes vont sauver le monde de la menace du réchauffement climatique. Il faudra un jour se...
Divertissement : « L’avenir de l’industrie musicale doit principalement être l’inspiration environnementale »
linkedintwitterDivertissement : « L’avenir de l’industrie musicale doit principalement être l'inspiration environnementale »Par Benjamin AdlerODD N°17 Partenariats pour la réalisation des objectifsIl n’y avait pas encore de smartphone que Téléphone rêvait d’Un Autre...
Trier, réduire et rallonger, le triptyque gagnant pour bouter les déchets hors de France, d’Europe, du Monde voire même de l’Espace !
linkedintwitterTrier, réduire et rallonger, le triptyque gagnant pour bouter les déchets hors de France, d’Europe, du Monde voire même de l’Espace !Par Gaël ClouzardODD N°6 : Eau propre et assainissementODD N°12 : consommation et production durablesODD N°13 : Mesures...
Le greenhushing ou l’art de taire l’impact de ses actions pour l’environnement
linkedintwitterLe greenhushing ou l’art de taire l’impact de ses actions pour l’environnementPar Florence BerthierODD 13 : Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiquesVous connaissez Le greenhushing ? C’est une tendance rampante et tenace qui cloue...